Thailande

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LES GITANS DE LA MER DE PLUS EN PLUS SEDENTARISES APRES LE TSUNAMI DE 2004

LES GITANS DE LA MER  : Une nouvelle vie après le tsunami

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Même s'il jette toujours ses filets de pêche dans une mer bleu azur au large de la Thaïlande, Saponkit Klatalay a renoncé à l'existence nomade de générations de "gitans des mers", depuis qu'il a été relogé sur le continent, après le tsunami de 2004.

Ce pêcheur de la communauté des Chao Lay doit sa survie à la connaissance de la mer transmise par ses ancêtres. Mais, paradoxalement, le tsunami a aussi eu pour conséquence de précipiter les Chao Lay vers la modernité, les éloignant de ce mode de vie traditionnel en osmose avec la mer.

"Tout ce que vous voyez est neuf. Quand le tsunami a frappé, tout ceci a été détruit", explique le pêcheur de 36 ans, en montrant les maisons de bois de son village natal, sur la côte est de Koh Phra Thon.

Il fait partie de ceux qui ont accepté de quitter la petite île pour être relogés sur le continent, dans le district de Khura Buri, à dix kilomètres de là.

Au total, quelque 5.400 personnes ont trouvé la mort lors du tsunami du 26 décembre 2004 sur les plages touristiques de Thaïlande.

Ici, la vague a atteint quatre mètres de haut mais les 500 Chao Lay de ce village ont survécu, grâce aux enseignements des anciens qui leur avaient expliqué comment décoder les signes précurseurs de la catastrophe.

"Ils nous avaient appris que l'eau reculerait, que sa couleur changerait, et que les oiseaux et les autres animaux auraient un comportement inhabituel", se souvient Saponkit Klatalay.

Jusqu'au 26 décembre 2004, il "ne croyait pas" à ces vieilles prophéties.

Mais il avait mémorisé les signes avant-coureurs, ce qui lui a permis de trouver ses enfants, de prévenir les autres habitants et de courir loin de la plage, avant que la vague ne la balaye.

Les quelque 12.000 Chao Lay de Thaïlande font partie du groupe ethnique des Moken, des Moklen et des Urak Lawoi, surnommés "gitans de la mer" en raison de leur mode de vie nomade depuis des siècles en mer d'Andaman, déplaçant leurs villages au rythme des pêches de poissons, de crevettes et de concombres de mer.

L'ethnie des Moken est la plus connue. Ses membres sont encore nombreux à pratiquer la nage sous-marine sans masque ni matériel de plongée.

Leur connaissance de la mer leur a permis de sauver des touristes lors du tsunami, soit en les enjoignant de se mettre à l'abri en hauteur soit en convoyant leurs bateaux au large, où la vague se ferait moins ressentir qu'à proximité des côtes.

Sur les plages ouest et sud de l'île, plus de cent personnes sont mortes, la plupart des Thaïlandais et des immigrés venus de Birmanie voisine, mais aussi quelques Chao Lay et des touristes occidentaux.

- Culture en voie de disparition? -

Suite au coup de projecteur porté sur ces "gitans de la mer" par le tsunami, le gouvernement thaïlandais s'est engagé en 2010 à préserver leurs traditions, orales. Sans grand effet jusqu'ici.

"Le tsunami a prouvé qu'ils savaient des choses que nous, hommes modernes, ne connaissons pas. On a tant à apprendre d'eux", déplore l'anthropologiste Narumon Hinshiranan, universitaire de Bangkok.

En emménageant après le tsunami dans le village de Khura Buri, construit grâce des ONG, Saponkit a reçu pour la première fois de sa vie un titre de propriété.

Il vit toujours de la pêche, mais sort désormais en mer à la journée. Et il complète les 120 euros mensuels tirés de la pêche par d'autres petits emplois comme du jardinage.

Sur l'île, l'école du village de son enfance a été agrandie grâce aux dons pour les victimes du tsunami. Mais, ironiquement, le bâtiment bleu ciel est déserté, en raison du départ en masse des habitants après le tsunami. Seuls 100 des 500 habitants sont restés.

Soucieux de l'éducation de ses trois enfants, il ne regrette néanmoins pas sa sédentarisation, malgré les discriminations dont fait souvent l'objet sa communauté.

Comme lui, la plupart les "gitans de la mer" sédentarisés disent que leur nouvelle vie est "plus facile". "Je me sens plus en sécurité ici. Nous sommes près du marché aux poissons et la vie est plus facile", explique la mère de Saponkit, Arom, en montrant fièrement sa première machine à laver, acquise à 63 ans.


AFP (http://www.lepetitjournal.com/bangkok) mercredi 16 décembre 2014



17/12/2014
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